Vers une meilleure prise en compte du sexe et du genre en santé
Fév.. 2025Sexe et genre en médecine et dans la santé
L'éditorial. Le sexe et le genre jouent un rôle central dans tous les aspects du système de santé. En effet, les maladies se manifestent différemment selon le sexe et le genre, que ce soit dans leur prévalence, leurs symptômes, les besoins en soins ou les réactions aux traitements. De même, les hommes et les femmes adoptent un comportement différent en matière de santé. Une médecine et des soins de santé tenant compte du genre et du sexe ne profitent pas seulement aux femmes, mais à toutes les personnes – indépendamment de leur sexe et de leur genre.
Malgré les progrès et l’intérêt croissant pour le domaine du genre en médecine, la prise en compte du sexe et du genre présente encore des lacunes dans de nombreux domaines, comme la recherche, le traitement et le suivi. Il est également nécessaire d’agir dans le domaine de la formation initiale, postgrade et continue des professionnels. C’est ce que révèle le rapport intitulé « Santé des femmes. Pour une meilleure prise en compte de leurs spécificités », que le Conseil fédéral a publié en mai 2024 en réponse au postulat Fehlmann Rielle (19.3910).
Sexe et genre
Les aspects biologiques et sociaux permettent de faire la distinction entre sexe et genre. La dimension biologique (sexe) comprend les caractéristiques anatomiques, génétiques, hormonales et physiologiques. On distingue généralement entre sexe masculin et féminin, mais le sexe biologique revêt souvent toute une variété d’autres formes. La dimension sociale (genre) se rapporte aux aspects culturels, sociaux et psychologiques. Elle renferme notamment l’identité de genre, le genre comme catégorie structurante de la société, les rapports économiques entre les genres et leur (re)production socioculturelle (p. ex. les rôles de genre, les comportements et les attentes spécifiques à chaque genre).
Toute la chaîne de soins est concernée
Les femmes sont désavantagées dans tous les domaines des soins de santé. C’est ce que montre le rapport de recherche du Centre interdisciplinaire pour la recherche en études de genre de l’Université de Berne (IZFG). Ce document sert de base au rapport susmentionné en réponse au postulat Fehlmann Rielle.
Cette inégalité se ressent à la fois dans la prévention, le diagnostic, le traitement, la réadaptation ou encore les soins de longue durée. Par exemple, de nombreuses mesures de prévention sont axées sur les risques de santé encourus par les hommes et négligent les facteurs de risque spécifiquement féminins, comme les symptômes liés au cycle menstruel. Les maladies comme le diabète et la démence sont moins souvent diagnostiquées chez les femmes, et les traitements sont souvent moins efficaces ou entraînent plus d’effets secondaires que chez les hommes. En outre, les maladies qui affectent exclusivement ou davantage les femmes sont souvent sous-étudiées et donc plus rarement décelées. L’endométriose en est un bon exemple : moins de la moitié des femmes touchées sont diagnostiquées, et lorsqu’elles le sont, il faut en moyenne six à neuf ans pour que le diagnostic soit posé (voir « Forum : l’endométriose, une maladie stigmatisante pour les femmes »).
Le genre joue aussi un rôle
Au-delà du sexe biologique, le genre est également un facteur important, car les rôles de genre traditionnels continuent d’influer sur la santé. Ainsi, les femmes sont davantage impliquées dans les tâches d’assistance et de soins (comme s’occuper des enfants ou aider des proches âgés), ce qui entraîne des sollicitations multiples et augmente le risque de stress. Dans le même temps, selon le rapport de l’IZFG, les femmes sont plus attentives à leur santé et ont plus souvent recours aux services médicaux. Les hommes, quant à eux, sont moins encouragés à parler de leurs sentiments, ce qui peut affecter leur santé mentale (cf. l’article « Santé psychique : reconnaître et dépasser les tabous liés au sexe et au genre »).
Depuis quelques années, la manière de penser évolue concernant la médecine de genre, que ce soit dans l’industrie, chez les autorités ou dans la recherche universitaire. On peut citer, par exemple, le lancement à l’été 2023 du Programme national de recherche « Médecine, santé et genre » (PNR 83). Ce programme vise à créer un socle de connaissances pour l’intégration des aspects liés au sexe/genre dans la recherche en santé, la médecine et la santé publique en Suisse, sur la base de données probantes.
Une variété de mesures
L’Office fédéral de la santé publique (OFSP) œuvre à ce que toute personne en Suisse jouisse de la meilleure santé possible et ait à accès aux soins, quel que soit son sexe et son genre. Il est responsable, avec d’autres services fédéraux, de la mise en œuvre de diverses mesures issues du rapport du Conseil fédéral en réponse au postulat Fehlmann Rielle. Il s’agit notamment, en matière de prévention, d’examiner comment les aspects liés au sexe/genre peuvent être mieux pris en compte dans la stratégie Prévention des maladies non transmissibles (stratégie MNT) et la stratégie Addictions. L’OFSP est également chargé de mieux intégrer les besoins spécifiques des femmes dans le cadre de la Plateforme nationale démence. Il lui incombe aussi de prendre des mesures dans le domaine de la formation initiale, postgrade et continue des professions de la santé.
Enfin, une meilleure prise en compte du sexe et du genre dans le système de santé nécessite un engagement des acteurs à tous les niveaux : développement et autorisation des médicaments, établissements de formation, associations professionnelles, pharmacies, hôpitaux et cabinets médicaux. S’il reste beaucoup à faire, plusieurs démarches ont été enclenchées en vue de mieux tenir compte de l’influence du sexe et du genre en médecine et dans les soins de santé.